dimanche 15 avril 2012
Rearray, Forsythe, Guillem, Le Riche.
Se « re-déployer »... voilà le nom du « pas de deux » écrit par William Forsythe pour Sylvie Guillem. Il sert de première partie à un triptyque étonnant qui rassemble les trois « grands » de notre monde dansé: Forsythe, Kylian, Ek...
Je voudrais revenir sur ce ballet « Rearray ». Le public reste une fraction de seconde suspendu entre la beauté et l'interrogation de « l'insoutenable étrangeté »
Il est donc écrit pour Sylvie par Forsythe. Ils se connaissent bien ces deux là. Cela date avant même la chorégraphie jubilatoire de « In the middle ». La rencontre d'une toute jeune danseuse (dont la précision du mouvement, le rythme parfaitement équilibré, souligne l'intégrité joyeuse de la pensée) et d'un chorégraphe qui avant tout cherche à comprendre ce qui se passe dans son corps et dans l'univers, non pas comme un « produit social de consommation » mais comme une véritable philosophie... et cette ascèse là, ils l'ont choisie tous les deux, se présentant de face et de dos dans le dénuement simple de leur corps magique. C'est l'entrée en matière du ballet on pourrait même parler de « quète du Graal » avec un peu de trop de solennité parcequ'il ont l'un et l'autre une bonne dose d'humour sur leur trajectoire respective, ce qui n'enlève rien de leur volonté farouche d'assumer leur choix;
« Concevoir l'espace ou l'on se meut » a dit Forsythe celui de Fukuchima a été ravagé par l'action de l'homme et cette chorégraphie est là pour « re-déployer » pour aider à repartir. Sylvie emmènera « 6000 miles away »dans tout le Japon peu de temps après la tragédie. Ce pays qu'elle aime... Une « synecdoque » dans son balluchon de voyageuse... Le petit pour le grand... mais quel petit...
Reprendre le vocabulaire classique, « les outils », issus de l'académisme (les tours, les arabesques), ces codes par lesquels le ballet romantique virtuose, a réussi à transmettre l'émotion et progressivement décentrer le regard en recherche, non plus sur l'histoire mais sur le fait même de la danse avec ses transitions, ses échappées d' une rationalité parfois cocasse; Il y a des moments qui font rire dans « Rearray ».
Nicolas Le riche et Sylvie Guillem vont progressivement trouver un accord dans cette solitude d'étoiles au travail avec des images riches d'imprévues, tant la précision due à leur vie de danse est féconde de chant intérieur. Décontruire... recontruire... redéployer... une suite sans fin dans leur histoire et dans l'histoire du monde...et du Japon...
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6 commentaires:
C'est bien ce qui me semblait en commentant ailleurs votre photo et avant d'avoir pris connaissance de ce texte.
H.S.
Merveilleux texte et réflexions qui nous poussent à voir la danse autrement. C'est vrai que "Rearray" n'est pas une danse "facile", mais lorsqu'on rentre dans cet art de Forsythe quasi mathématique mais tout aussi émouvante grâce surtout au génie créatif de Sylvie et la grâce féline de Nicolas Le Riche. C'est comme si on voyait toute l'évolution de la danse (classique et moderne) devant nos yeux. C'est certain pour le grand public un morceau comme celui de Kyllian sur un couple qui se décompose (avec des thèmes plus "évidents", ainsi qu'un peu de nudité ça attire) "séduit" plus facilement, mais la richesse de "Rearray" repose sur le fait qu'il permet au spectateur plusieurs lectures, plusieurs visions, tel un kaléidoscope qui renvoie de myriades d'images sur la danse, sur la beauté et la solitude du métier du danseur.
Du mal à laisser un message.
Je réessaie.
Un portrait chorégraphique subtilement présenté, tant de nuances et une approche tellment en connaissance, passionnant ma chère Laurence.
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