Bunraku : Sonezaki Shinju . Hiroshi
Sugimoto .Théâtre de la ville
L'art de la marionette a passionné des
grands du théâtre. Edward Gordon Craig et Kleist s'en serviront
pour élaborer des théories sur l'art théâtral et sans doute comme
au Japon, cet art est très ancien. On le trouve dès le 7e siècle
au Japon mais c'est au 16e siècle avec l'arrivée du shamisen un
instrument de musique à 3 cordes et la conjonction d'un conteur
que le théâtre de marionnettes acquière son unité.
C'est curieusement par le biais de la
photo qu'Hiroshi Sugimoto grand artiste pluridisciplinaire japonnais
se tourne vers le Bunraku. Il photographie les cires de Madame
Tussaud et décide de travailler avec les poupées dans le désir de
se tourner vers les arts de la performance : le « divin
éphémère »... Exprimer la modernité d'une époque en lien
avec celles qui la précèdent est dans sa logique. Son choix se
porte sur la première pièce conservée de Chikamatsu, l'épopée
de deux amants, qui va les conduire dans un suicide d'Amour comme
une sorte d'aspiration à la Pureté et à la Beauté.
Les poupées sont de la taille d'une
moitié d'être humain; elles sont manipulées par 3 personnes : le
maître qui de sa main gauche contrôle le poids, les mouvements de
la tête et le bras droit jusqu'aux phalanges ; son assistant
contrôle le bras gauche et le troisième le mouvement des pieds. Les
marionnettistes sont vêtus de noir et portent une cagoule sur la
tête. La transmission de la vie leur demande une chorégraphie
prècise. Regarder le déplacement et la virtuosité de ces ombres
est déjà un spectacle... Les poupées elles, richement vêtues,
semblent voler dans l'espace selon des lignes mystérieuses qui ont
un rapport avec l'âme... les récitants, dont la vigueur est intense
se relayent sur une petite scène à droite qu'ils partagent avec les
joueurs de shamisens.
La grâce naturelle de cette longue
marche vers la mort des deux poupées qui ont une pâleur de lune ,
emporte l'imagination dans une sorte de lyrisme rythmé par la voix
et la musique acide du ou des shamisens.. On traverse les espaces
temps pour se retrouver avec eux dans ce récit à la fois cruel et
beau .