dimanche 29 novembre 2009

Robert Lepage...."Comme si"

En voyant, dans Eonnagata, Robert Lepage, représenter le chevalier d'Eon ,dans sa robe à crinoline, sur ses socks japonnisants, j'ai eu envie d'analyser, ce moment précieux, d'une infini rareté que l'on appelle: "choc artistique" ou "syndrome de Stendhal".

La vision d'une oeuvre d'art (et à ce moment là, l'acteur Robert Lepage en était une) fait transcender le spectateur sur son fauteuil, pour le conduire là, sur la scène,au coeur même, du "centre imaginaire" ou fusionnent alors, deux expériences: celle de l'acteur et celle du spectateur.
Le mouvement de l'acteur, ou même simplement dans l'immobilité, son rythme respiratoire, stimule sans doute, quelque chose de la rétine périphérique du spectateur, celle liée aux zones très primitives du cerveau, celle qui, toujours aux aguets, dans un mécanisme réflexe, met en jeu(on pourrait dire,"une surbrillance")une disponibilité parfaite de l'être à la fois de son tonus musculaire mais aussi et dans ce cas précis de son tonus émotionnel, à laquelle, s'ajoute des signes physiques:tachycardie,vertige (mais non ce ne sont pas des signes d'hypoglycémie!!!!)
De cette forme "éveillée", de ce rythme particulier en toile de fond, se détache, tout à coup, des ancrages, des entrecroisements:le contact invisible de l'entre-deux.

Le jeu du visage, la position de la tête, des épaules, des bras, bref de la partie "signifiante et active" du corps, par opposition à la partie basse, qui est plutôt adaptative(penser à la valeur de l'épaulé en danse classique)dans une sorte de "suspendu" du temps permet d'entrer dans un état de profonde disponibilité.
L'acteur,qui nous invite ainsi, délibérément et audacieusement, nous fait entrevoir alors autre chose, qui résonne en nous, une sorte d'irréalisme, de "rêve éveillé" qui rayonne d'une énergie de création:l'unicité magique fait sens...pour les deux le spectateur et l'acteur...

Avez vous senti monsieur Lepage que mon regard vous poussait à vous dépasser?
Sans doute pas précisément.
Mais le silence du public, est ce bain amniotique dans lequel se forme "l'au delà" de l'acteur.
Et bien ce soir là vous étiez dans "l'au delà" monsieur Lepage...

8 commentaires:

colorature a dit…

eonagata a été le vrai défi de robert tant sur le plan physique que sa manière d'aborder le théâtre ...avec de la souffrance

laurence a dit…

Oui je l'ai ressentie... et il lui disait" sois sage oh ma douleur..."

Pierre a dit…

Bien trouvé, la surbrillance; et beau texte, inscrit dans une réalité.
Le lecteur est un peu à la représentation et un peu dans vos pensées; du "pendant", et de "l'après".

LE MAMI a dit…

Si Monsieur Lepage a le bonheur de vous lire ici, vous devez, l'un et l'autre, boire du petit lait, non?
Baltha

Anonyme a dit…

Baltha, pas vraiment pour moi, mais si Robert Lepage en boit un peu c'est un juste retour des choses...et en tout cas c'est très sincèrement que je le pense...la maturation faite depuis le Sadler est un véritable défi... et la preuve que rien n'est statique,une belle preuve d'humilité non? Dans cette ville ou existe une école du cirque... une école du travail ensemble...et du surpassement...et de la relativité de toutes choses sauf du grand art...laurence

deef a dit…

Choc artistique ou instant de grâce ?
Merci de tes passages chez moi :)

Gilbert Pinna, le blog graphique a dit…

Beaucoup d'acteurs disent qu'ils sentent véritablement sur eux, en eux, le regard des spectateurs...il y a là à l'oeuvre, ainsi que vous l'écrivez, une captation réciproque, qui ne pétrifie pas, au contraire, qui libère...

choule[bnkr] a dit…

par contre je te déconseille de regarder "le Syndrôme de Stendhal" de Dario Argento, ça fout les boules.